Aujourd'hui, Horaire de prières sur ANGERS

mercredi 23 juin 2021

La demeure spirituelle du réveil par Ibn Al-Qayyîm Jawziyyah



La première demeure spirituelle de la servitude est le réveil -yaqaza-. C’est l’émotion qu’éprouve le cœur quand il s’aperçoit avec stupéfaction de l’état d’indifférence dans lequel il sombrait. Par Allah ! Combien est bénéfique cette stupeur ! Combien est grande sa valeur et combien elle est déterminante ! Comme elle est utile en matière de cheminement spirituel ! Celui qui la ressent ne doit certes pas tarder à sentir venir la réussite. Sinon il sombrerait encore dans l’ivresse de l’indifférence.

Un serviteur qui connaît ce genre de réveil entreprend avec énergie, en vue de plaire à Allah, le voyage vers ses premières demeures et patries d’où il a été chassé [par satan et ses alliés]. Il se prépare alors au voyage et passe à la demeure de la résolution, à savoir la détermination ferme d’accomplir le voyage, de quitter tout ce qui peut l’en empêcher ou le gêner et d’emmener avec lui tout ce qui peut l’aider et le guider. C’est en fait sa lucidité et son état d’éveil qui déterminent sa résolution et c’est la force de sa résolution qui détermine sa préparation.

Lorsque le serviteur se réveille, le réveil implique pour lui la pensée, à savoir la concentration du cœur sur l’objectif pour lequel il se prépare de manière globale, sans parvenir encore à connaître ses détails et le moyen d’y accéder.

Une fois que sa pensée se précise, elle lui ouvre le chemin de la clairvoyance qui est une lumière projetée dans le cœur par laquelle il perçoit la Promesse et la Menace [divines], le Paradis et l’Enfer, ce qu’Allah a préparé dans la première demeure pour Ses alliés et ce qu’Il a préparé dans la deuxième demeure pour Ses ennemis. Il voit alors les gens sortir de leurs tombes, la tête baissée, répondant à l’appel du Réel — exalté soit-Il — ; les anges descendre des cieux et les cerner ; la terre resplendir de la lumière de son Seigneur ; le livre [des œuvres] déposé [devant leurs auteurs] ; les Prophètes et les témoins appelés ; la balance dressée ; les registres en vol ; les adversaires en comparution ; les créanciers agrippés à leurs débiteurs ; la Vasque et ses coupes à la portée des mains des assoiffés dont peu d’entre eux reçoivent l’autorisation d’en boire ; le pont jeté pour la traversée, les gens poussés vers lui, chacun recevant la part de la lumière qu’il mérite pour le traverser au milieu des ténèbres, l’Enfer grondant sous le pont, ceux qui y sont précipités dépassant largement ceux qui en échappent. Ainsi s’ouvre dans son cœur un œil par lequel il voit tout cela et il s’érige alors dans son cœur une vertu contemplative de l’Au-delà qui lui fait voir la vie future et sa pérennité puis, en même temps, la vie d’ici-bas et sa finitude.

La clairvoyance est une lumière qu’Allah projette dans le cœur qui perçoit grâce à elle la réalité de ce que les Envoyés ont apporté comme s’il en était un témoin oculaire. Ainsi il prend conscience du bénéfice dont il pourra jouir s’il suit la voie à laquelle ont appelé les Envoyés et le dommage qu’il risquerait de subir si jamais il déviait de cette voie. C’est ainsi qu’il faut comprendre la parole d’un des pieux gnostiques : « La clairvoyance, c’est le fait de s’apercevoir à quel point on peut jouir d’une chose et à quel point on peut en pâtir. » Certains d’entre eux ont dit : « La clairvoyance, c’est ce qui te délivre de l’hésitation, que ce soit par une certitude inspirée par la foi ou par une certitude acquise par une vision oculaire. »

Parmi les degrés du réveil du serviteur, il y a celui de la connaissance des actes qui ont permis soit l’augmentation de sa foi soit sa diminution. Ainsi il essaie de se rattraper pendant les jours précieux qui lui restent de sa vie et veille à ne pas perdre la moindre heure, voire le moindre souffle, dans ce qui ne le rapproche pas d’Allah. Les gens qui tombent dans la perdition ont en commun la négligence, bien que certains soient dans une situation pire que d’autres. Tout souffle qui se dégage du serviteur dans ce qui ne le rapproche pas d’Allah, sera pour lui une source de remords accablants le Jour de son retour ultime et un arrêt dans son cheminement sur la voie, ou un retour en sens inverse s’il continue ainsi, ou un obstacle s’il meurt dans cette situation.

S’il réussit en cette station et s’installe en cette demeure, elle lui donnera vue sur la station de la repentance. Car par un examen de conscience, il fera la distinction entre ce qui est à son avantage et ce qui ne l’est pas. Il ne lui reste qu’à se concentrer sur elle pour s’y installer et l’observer jusqu’à sa mort.

La demeure spirituelle de la repentance est l’une des premières demeures. Elle fait également partie des demeures médianes et dernières. Le serviteur qui chemine sur la voie d’Allah ne s’en sépare pas. Il reste dans cette demeure jusqu’à la mort. Même lorsqu’il passe d’une demeure à une autre, il l’emmène avec lui et fait halte en sa compagnie. Le repentir est en effet le début du serviteur et sa fin. Le besoin de se repentir à la fin de sa vie est aussi nécessaire que son besoin de se repentir au début de sa vie ; Allah le Très-Haut a dit : " Et repentez-vous envers Allah, vous les croyants, peut-être réussirez-vous. " [1] Ce verset figure dans une sourate qui a été révélée après l’hégire, cela signifie qu’Allah s’adresse par ces paroles aux gens de la foi et aux meilleures de Ses créatures. Il leur demande de se repentir après qu’ils aient embrassé la foi, fait preuve de constance, accompli l’hégire et mené le djihad. Allah a subordonné la réussite et le salut au repentir à titre de subordination de l’effet à sa cause et Il a employé pour cela la particule « la`alla » (traduite par « peut-être ») qui exprime l’espoir, c’est comme s’Il leur disait : « Si vous vous repentez, vous pouvez espérer la réussite », ce qui veut dire que seuls les repentants peuvent espérer la réussite — qu’Allah nous range parmi eux ! —.

Allah — exalté soit-Il — a dit : " Quant à ceux qui ne se repentent pas, ceux-là sont les injustes. " [2] Ainsi Allah a divisé les serviteurs en deux catégories : les repentants et les injustes — il n’y a point de troisième catégorie —. Il a appliqué le nom « injuste » à celui qui ne se repent pas, et certes personne n’est plus injuste que lui, en raison de son ignorance de son Seigneur, du droit qu’Il a sur lui, des défauts de son âme et de la malignité de ses œuvres.

Il est rapporté dans le sahîh [de Muslim] que le Prophète a dit : « Ô gens, repentez-vous à Allah ! Par Allah, je me repens à Lui plus de cent fois par jour. » [3]

Les Compagnons avaient compté que l’Envoyé d’Allah disait cent fois au cours d’une seule assemblée : « Seigneur, pardonne-moi et accorde-moi Ton repentir ! Tu es Pardonnant et Tout-Miséricordieux. » [4]

Depuis qu’il a reçu comme révélation la sourate suivante : " Lorsque viendra le secours victorieux d’Allah ainsi que l’ouverture, et que tu verras les gens entrer en masse dans la religion d’Allah, glorifie par la louange ton Seigneur et implore Son pardon car Il accorde volontiers Son repentir " [5], le Prophète n’a pas effectué une prière sans y faire l’invocation suivante : « Ô mon Dieu, je Te glorifie, mon Seigneur, en usant de la louange que Tu t’es adressée à Toi-même et je Te demande de me pardonner. » [6]

Il est authentiquement rapporté qu’il () a dit : « Nul n’aura le salut par son action. — Même pas toi, ô Envoyé d’Allah ? dirent [les Compagnons]. — Même pas moi, répondit-il, à moins qu’Allah ne me couvre de miséricorde et de grâce. » [7]
_________________________




[1] Coran, an-nûr, 31.

[2] Coran, al-hujurât, 11.

[3] Hadith rapporté par Muslim — Livre du dhikr —.

[4] Hadith rapporté par at-Tirmidhî — Livre des invocations-, Ahmad dans son musnad (1/388-394-410-434-455) (2/84) avec une chaîne d’autorités fiable.

[5] Coran, an-nasr.

[6] Hadith rapporté par al-Bukhârî — Livre de l’appel à la prière — et Muslim — Livre de la prière —.

[7] Hadith rapporté par al-Bukhârî — Livre des exhortations attendrissantes — et Muslim — Livre des qualités des hypocrites —.

Aucun commentaire: